
Le nageur double médaillé de bronze paralympique 2024, sur 50 mètres papillon et 100 mètres nage libre, regrette que l’exposition dont bénéficiait alors le parasport se soit tarie, tout comme les subventions qui y sont affectées.
- Quel bilan d’ensemble faites-vous presqu’un an après la fin des JOP ?
L’aspect négatif, que tout le monde a pu constater, c’est la réduction du budget affecté au sport. On a beaucoup parlé de l’héritage des Jeux et, au final, il n’y en a pas. Je suis déçu.
Le parasport a été énormément médiatisé durant les Jeux olympiques. Depuis, c’est retombé et c’est vraiment dommage. Par exemple, la France a accueilli une épreuve de Coupe du monde de paranatation, sans compter les championnats de France, et aucun média n’est venu nous voir. Le parasport n’est pas du tout suivi en France. Maintenant que les Jeux paralympiques sont terminés, cela n’intéresse plus les médias.
- En êtes-vous surpris dans la mesure où, durant les Jeux paralympiques, outre la qualité du spectacle, les valeurs du parasport avaient fait l’unanimité et étaient louées par tout le monde ?
Non, franchement, cela ne me surprend pas du tout. Même si, après toutes les belles paroles prononcées par les uns les autres, j’espérais que cela ne soit pas le cas, je m’attendais quand même pas à cela.
Certes, je n’attendais pas grand-chose mais je trouve que c’est dommage pour les futures générations car c’est en diffusant des sports à la télévision que l’on crée des champions. C’est pour ça que j’aurais pensé que le service public de l’audiovisuel ferait quelque chose pour le parasport. Finalement, ce n’est pas le cas…
- Comment l’expliquez-vous ?
Je n’ai pas vraiment d’explication. On s’aperçoit, d’ailleurs, que les sports olympiques ne sont pas plus mis en valeur à la télévision. Ils sont exactement confrontés aux mêmes problématiques que nous.
- À titre personnel, devez-vous faire face à davantage de difficultés, qu’il s’agisse de l’aspect logistique, pour avoir des créneaux d’entraînement en piscine, ou sur le plan financier ?
Mes conditions d’entraînement sont toujours les mêmes qu’avant les JO et c’est une très bonne chose. Je m’entraîne dans une structure club, aux Girondins de Bordeaux Natation. Tout va donc très bien de ce côté-là. Pour ce qui est des sponsors, la majorité d’entre eux sont partis car ils avaient uniquement en ligne de mire les JOP de 2024. Heureusement, un partenaire majeur a vraiment continué à me suivre, en l’occurrence la Française des Jeux. C’est d’ailleurs l’un des rares à avoir continué de soutenir les sportifs olympiques et paralympiques.
- Cette désaffection de certains est-elle décevante sur le plan humain ?
Non car je ne veux pas voir les choses comme cela. Je veux plutôt retenir qu’ils m’ont soutenu jusqu’aux Jeux et que cela m’a été d’une grande aide. C’est aussi grâce aux partenaires que l’on gagne des médailles. À un moment donné, eux aussi doivent passer à autre chose et c’est la fin d’un cycle. C’est normal.
Je savais que cela allait arriver et je m’y étais préparé. À nous de trouver de nouveaux partenaires pour être plus à l’aise financièrement et pouvoir faire les choix d’entraînement les plus pertinents possible. Mais ce n’est pas simple.
- Comment allez-vous faire ?
Pour l’instant, je n’en ai pas trouvé. Cela demande du temps. Il n’est pas non plus si simple de trouver un agent pour s’en occuper. Je suis ingénieur en efficacité énergétique et je travaille dans le domaine des centrales solaires. J’ai la chance de bénéficier d’une Convention d’insertion professionnelle (CIP) avec la société Eiffage qui m’emploie. Cela me permet de travailler à mi-temps mais d’être rémunéré à temps plein.
- Avez-vous peur de l’avenir ?
Non. En ce qui me concerne, cela devrait rouler jusqu’aux Jeux de Los Angeles.
- Y a-t-il quand même un point positif dans tout cela ?
Oui. J’ai été très surpris, lors des derniers championnats de France, en juin, de voir qu’il y avait énormément de jeunes athlètes présents, en particulier des 12-16 ans, sachant que le plus jeune participant avait huit ans. Je pense que ce sont des gens qui ont franchi le pas grâce aux Jeux paralympiques de Paris. Ils les ont regardés à la télévision et se sont dit qu’ils voulaient faire pareil. C’est vraiment une bonne chose car cela permet d’assurer la relève, d’étoffer les équipes de France et de pousser les vieux dehors (rire).
- Craignez-vous qu’ils soient contraints d’arrêter dans quelques années, faute de moyens pour accéder au haut niveau ?
Je ne l’espère pas pour eux. L’avenir le dira.
Lors de cette saison post-olympique, nous ne sommes pas partis à l’étranger pour disputer une étape de Coupe du monde. Or, normalement, nous le faisons une fois par an. Nous ne sommes pas non plus allés en stage à l’étranger. Je pense que c’était pour des raisons budgétaires. Il y a peut-être aussi eu une volonté de programmer une année off mais cela a été imposé aux athlètes.
Propos recueillis par Alexandre Terrini pour le numéro 2597 du magazine Les Jeunes.